Zeineb GOLLI

Laboratoire Intersignes(LR14ES01)

FSHST -Université de Tunis

L’IA invitée d’honneur du temple tunisien des humanités

Ayant la faculté de simuler l’intelligence humaine, l’Intelligence Artificielle (IA) occupe aujourd’hui une place primordiale dans tous les domaines et notamment dans la Recherche scientifique et académique. Nombreux sont les chercheurs et les enseignants qui s’y intéressent et manifestent une grande curiosité intellectuelle à interroger les corpus numériques et génétiques dans leurs champs de recherche et de réflexion mais aussi dans leurs méthodes d’enseignement.

C’est dans cette perspective qu’un colloque International intitulé « Construire et interroger les corpus numériques à l’ère de l’Intelligence Artificielle » a été organisé le 29 février et le 1er mars 2024 à la Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis. Cet événement coorganisé par les professeures BASSI et SAMET et par le Laboratoire INTERSIGNES a permis aux nombreux participants d’errer dans les méandres des corpus numériques et de leurs particularités et d’explorer de nouvelles pratiques éthiques et épistémologiques qualitatives, assurant ainsi un débat enrichissant et un échange ouvert et fructueux.

Des interventions attrayantes ont suscité de nombreux questionnements sur l’utilité du recours au numérique en classe, le traitement des corpus et les valeurs aussi bien pédagogiques qu’andragogiques apportées dans l’apprentissage de la langue. Les journées ont également accueilli des participants, chercheurs et enseignants, issus d’institutions étrangères et qui ont renforcé davantage la pensée autour des compétences numériques et rédactionnelles.

Les humanités numériques interrogées par les jeunes

Outre la visée didactique de ce colloque, l’évènement se veut une rencontre pluridisciplinaire où sont réunis littéraires, scientifiques, étudiants, chercheurs et enseignants, manifestant par leur présence, un intérêt ardent vis-à-vis de la thématique choisie. Plusieurs approches ont été traitées de manière alléchante et originale dont l’Ecocritique, la sémantique, la géopoétique.

Interroger les systèmes connexionnistes de l’IA, faire appel aux corpus numérisés, introduire l’automatisme aux dépens de l’humain, réfléchir sur l’avènement de l’ère électronique, représentent, entre autres, les sujets qui ont stimulé l’intérêt de jeunes étudiants, motivés par l’apport de la problématique posée.  D’ailleurs, on a profité de l’occasion pour avoir une idée sur leur « feed-back » suite à leur présence au colloque. Etudiant en deuxième année sociologie, Mohamed Ali a exprimé son attrait en ces mots : « L’expérience est bonne et m’a enthousiasmé, le sujet est d’actualité, il m’a réellement tenu en haleine et m’a boosté à travailler encore plus sur des problématiques pareilles ». Et concernant la possibilité de substituer le numérique en classe à la place de la méthode éducative traditionnelle, l’étudiant a répondu : « la méthode classique, le « eye-contact », la présence humaine et le contact direct avec l’enseignant sont inégalables ».

Quant à Chayma, étudiante à la faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis, elle a exprimé sa grande satisfaction à l’égard de la qualité des interventions présentées et a manifesté son intérêt à la thématique en disant : « L’Intelligence Artificielle n’est pas l’apanage de la littérature ou de l’enseignement. Aujourd’hui, de nombreux médecins usent de la « télémédecine » qu’elle soit efficace ou non, reste à tester mais, à ma connaissance, les champs de réflexion s’élargissent autour du « tout à distance » et du « tout numérisé ». « Toutefois », ajoute-t-elle, l’accès aux moyens informatisés demeure problématique et limité. Selon Chayma, tout le monde ne dispose pas d’une bonne connexion internet pour accéder à l’univers du digital, bien que nous envisagions de l’utiliser « obligatoirement », dans les cinq prochaines années. »

De l’enthousiasme et des réserves

Anis a lui aussi apprécié l’initiative en insistant sur la portée instructive de ce colloque mais en pensant que « le numérique éducatif » prime aujourd’hui et est en train de concurrencer la méthode traditionnelle de l’enseignement. Pour lui, les logiciels et les plateformes sont plus productifs et plus conformes aux attentes vigoureuses des utilisateurs que l’être humain.  Il a cité l’exemple de Chat GPT et de son efficacité en insistant sur ses bienfaits et en alertant aussi sur ses méfaits : « C’est nous qui avons inventé Chat GPT et c’est à nous d’être conscients des périls et des conséquences néfastes que peut entraver un usage non modéré de cette invention ».

L’interview s’est clôturée en beauté avec Nour, étudiante en Licence, qui trouve que malheureusement et bien que l’enseignement dynamique soit une solution moderne et innovante, il réduit l’être l’humain à un simple individu robotisé, accro au machinisme, aveuglément soumis à ce que lui impose les logiciels connectés et les techniques développées. « Nous vivons en perpétuel conflit et cela me révolte réellement. Il faut d’abord sensibiliser l’homme des inconvénients et des impacts des réseaux sociaux par exemple. Aujourd’hui, beaucoup sont ceux qui passent un temps énorme à simplement défiler les contenus sur les ordinateurs et les smartphones, à « scroller » de manière systématique et inconcevable. Néanmoins, elle en voit l’efficacité dans la mesure où, d’après elle, cela nous permet de s’ouvrir sur le monde sans forcément bouger, d’explorer l’univers … On doit malgré tout être reconnaissants aux mérites de ce progrès digital et numérique ».

Ce colloque était une opportunité considérable de se familiariser avec les outils numériques notamment à travers les différents ateliers proposés aux étudiants et aux doctorants portant sur les écrits professionnels, les outils informatiques au service des écrits littéraires, la manipulation de nouvelles méthodes numérisées. C’était aussi l’occasion d’un échange fructueux et de débats impressionnants.

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